Une captivité voluptueuse

 

 

LORSQUE la Belle s’éveilla, il faisait nuit. En se tournant sur le ventre, elle vit, par une petite fenêtre grillagée, les étoiles. Le grand vaisseau craquait de toutes ses membrures, ses voiles chantaient, et il taillait les vagues.

Mais, quand on vint la cueillir dans sa cage, ses rêves ne s’étaient pas encore dissipés, et on l’allongea de nouveau sur un énorme coussin, posé cette fois sur une longue table.

Des chandelles brillaient de tous leurs feux. Elle pouvait humer le parfum lourd de l’encens. Elle perçut aussi, à distance, les notes d’une musique riche et vibrante.

Les jolis jeunes hommes l’entourèrent, oignirent sa peau de la même huile d’or, lui adressant des sourires tout en s’affairant, lui étirèrent les bras en l’air, en arrière, en apprenant à ses doigts comment ils devaient se tenir bien fermement au rebord du coussin. Et puis elle vit ce pinceau que l’on trempait pour lui peindre ensuite les tétons, très soigneusement, avec un pigment d’or scintillant. Elle était trop bouleversée pour proférer le moindre son. Elle resta immobile, allongée, pendant qu’on lui peignait également les lèvres. Puis, maniés d’une main habile, les doux poils du pinceau lui soulignèrent d’or le contour des yeux et lui en caressèrent les paupières à petits coups légers. On lui présenta de grandes boucles serties de pierreries, et elle eut un tressaillement lorsqu’elle sentit qu’on lui perçait le lobe des oreilles, mais les sourires silencieux de ses ravisseurs l’incitèrent d’autant plus vivement à se taire, et ils la consolèrent. Les boucles d’oreilles dansaient, suspendues à ces petites blessures cuisantes, mais la douleur se dissipa dès qu’elle sentit qu’on lui ouvrait les jambes. Puis elle vit qu’on tenait au-dessus d’elle un bol de fruits chatoyants aux couleurs vives. On retira de son sexe la petite armure de la treille d’or, et des doigts caressants le flattèrent, le caressèrent, jusqu’à ce qu’il se réveille. Puis elle vit ce même joli visage olivâtre, celui de l’homme qui avait été le premier à la saluer. Ce devait être son serviteur attitré. Elle le vit prendre quelques fruits dans le bol – des dattes, des quartiers de melon et de pêche, de petites poires, des baies d’un rouge sombre – pour en tremper ensuite chaque morceau, soigneusement, dans une coupe de miel.

On lui écarta les jambes, et elle comprit qu’on allait enfoncer en elle ces fruits enduits de miel. Son sexe bien élevé se resserra irrésistiblement sur ces doigts de soie qui faisaient profondément pénétrer des quartiers de melon à l’intérieur de son corps, un morceau après l’autre puis un autre encore, provoquant en elle des écoulements et des soupirs sans cesse plus soutenus.

Elle ne pouvait se retenir de gémir, mais, cela, ses ravisseurs avaient l’air de l’approuver. Ils opinaient du chef, et leurs sourires se firent plus radieux. Elle était pleine de fruits. Elle se sentait gonflée de fruits. Et voici qu’on lui présenta une grappe de raisin bien mûre qu’on lui posa entre les jambes. Et puis l’on fit osciller au-dessus de son visage un rameau de jolies fleurs blanches, on lui ouvrit la bouche, on lui plaça le rameau entre les dents, et les pétales de cire lui effleurèrent les joues et le menton avec la plus grande légèreté.

Elle s’efforça de ne pas mordre la tige, se contentant de la tenir fermement. On lui enduisit les aisselles d’une épaisse couche de miel. Et quelque chose, une datte bien enflée peut-être, lui fut enfoncé dans le nombril. Des bracelets incrustés de pierreries lui enserrèrent les poignets. On lui passa de lourds bracelets de cheville. Elle ondulait sur l’oreiller, sous la montée de cette tension presque irrésistible, vaguement envoûtée par ces visages souriants. Mais elle connut aussi la peur, celle de se sentir transformée de la sorte en un ornement d’un genre très singulier.

C’est alors qu’on la laissa seule en la priant instamment de se tenir immobile et silencieuse.

Puis elle entendit qu’on s’affairait vivement à d’autres préparatifs dans la pièce, elle entendit d’autres soupirs très doux et put presque distinguer le tempo d’un cœur battant avec inquiétude, juste à côté d’elle.

Finalement, leurs ravisseurs refirent leur apparition. On la souleva sur le grand coussin comme un trésor. Durant la montée de l’escalier, la musique joua plus fort. Les parois de son sexe étaient resserrées sur l’énorme boule de fruits qui le fourrait, sur le miel et les sucs qui s’écoulaient d’elle goutte à goutte. La peinture d’or séchait sur ses tétons, et, ce faisant, elle lui tendait la peau. Sur chaque centimètre de sa chair, elle ressentait une stimulation d’un genre inédit.

On l’amena dans une grande chambre, doucement éclairée d’une lumière chatoyante. L’odeur de l’encens y régnait, entêtante. L’air palpitait au rythme des tambourins, des cordes frottées des harpes, des notes, métalliques et aiguës, des autres instruments. Au-dessus de sa tête, les tentures du plafond s’animèrent de mille et un feux, fragments de miroirs, perles scintillantes, motifs tressés d’or.

On l’installa de nouveau sur le sol et, en tournant la tête sans pouvoir bouger, elle aperçut les musiciens, là-bas, sur la gauche, et, juste à côté d’elle, sur sa droite, ses nouveaux Maîtres, assis en tailleur, qui banquetaient en se servant dans de grands plats remplis de mets au fumet délicieux, vêtus de leurs tuniques et de leurs turbans de soie brodée, et qui, de temps à autre, lui lançaient un regard tout en bavardant entre eux de leurs voix vives et feutrées.

Elle gigota sur le coussin, en se tenant fermement aux rebords, tout en gardant les jambes écartées, ainsi qu’on le lui avait si bien enseigné au village et au château. Ses serviteurs silencieux et craintifs l’avertirent, l’implorèrent en lui adressant des regards noirs, en posant le doigt sur leurs lèvres, puis de nouveau ils se retirèrent dans la pénombre où ils se tenaient pour la surveiller, sans se faire remarquer de ceux qui ripaillaient.

« Ah, quel est ce monde étrange dans lequel je renais ? » songea-t-elle, les fruits gonflant les parois rétrécies de son vagin en chaleur. Elle sentit ses hanches se cabrer sur la soie, les élancements des boucles aux lobes de ses oreilles. La conversation suivait son cours naturel, et, de temps à autre, l’un de ces Seigneurs enturbannés de noir lui adressait un sourire avant de retourner à sa palabre.

Mais une autre figure fit son apparition. Une présence qu’elle entrevit du coin de l’œil, sur sa gauche. Elle s’aperçut qu’il s’agissait de Tristan.

On lui fit faire son entrée à quatre pattes, au bout d’une longue chaîne en or attachée à un collier incrusté de pierreries. Lui aussi avait le corps enduit de l’huile d’or, et ses tétons étaient dorés. L’épais buisson de son pubis était parsemé de petites pierreries étincelantes, et sa queue en érection luisait sous la fine pellicule de la dorure. Il avait les oreilles percées mais ne portait pas de boucles d’oreilles, c’étaient de simples rubis. Ses cheveux étaient séparés par une raie au milieu, et on les avait magnifiquement parsemés de poussière d’or. De la peinture dorée lui soulignait les yeux, lui chargeait les cils, dessinait sa bouche parfaite, étonnante. Et ses yeux bleu-violet brûlaient d’un éclat iridescent.

Ses lèvres formèrent un demi-sourire, tandis qu’on le menait près d’elle. Il n’avait l’air ni triste ni effrayé, mais bien plutôt égaré, dans son désir d’exaucer les vœux du bel ange aux cheveux noirs qui le conduisait. Et cet être à la peau sombre le guida pour qu’il enjambe la Belle, lui fit poser la tête contre son aisselle gauche, jusqu’à ce que son visage vienne au contact du miel, et, là, il se mit en devoir de laper.

La Belle soupira sous cette langue pressante, humide et dure qui léchait les courbes de ses chairs. Et puis ses yeux s’ouvrirent très grands lorsqu’il la nettoya de tous ses liquides, ses cheveux lui chatouillant le visage, et lorsqu’il se courba pour venir se nourrir à son autre aisselle, la droite, avec la même avidité.

Il avait l’air d’un dieu inconnu penché sur elle ; son visage peint paraissait remonter des profondeurs de ses rêves inavouables ; ses bras puissants, ses épaules luisaient, magnifiquement lustrés.

En tirant d’un coup sec sur la chaîne d’or fragile, le guide agile aux longs doigts le fit descendre plus bas, lui fit abaisser sa tête chatoyante jusqu’à ce que, insatiable, il attrape la datte enduite de miel fourrée dans son nombril.

Sous les attouchements de ses lèvres et de ses dents, les hanches et le ventre de la Belle se relevèrent d’un coup sec, un gémissement lui échappa, et les fleurs qu’elle tenait dans sa bouche frémirent contre ses joues. Puis, comme dans un brouillard, elle vit les serviteurs, lointains, qui souriaient, opinaient, l’encourageaient de leurs cajoleries.

Tristan s’agenouilla entre ses jambes. Et, cette fois, le serviteur n’eut pas à prendre la peine de lui guider la tête. Avec un geste presque sauvage, Tristan mordit dans les parures de fruits, et le contact délicat de ses mâchoires contre son pubis la rendit presque folle.

Il dévora les grains de raisin et, la bouche tout contre ses lèvres pubiennes, il saisit entre ses dents de gros morceaux de melon.

La Belle se tortilla, s’accrocha au coussin. Ses hanches décollèrent. C’était irrépressible. La bouche de Tristan s’enfouit plus profondément en elle, ses dents lui mordillaient le clitoris, le léchaient à mesure qu’il extrayait d’autres fruits de son vagin. Et, prise d’oscillations, d’ondulations furieuses, la Belle se tendit de toutes ses forces pour s’offrir à lui.

Dans la pièce, la conversation s’était tue. La musique jouait en sourdine, en cadence, à en être presque obsédante. Et ses propres gémissements se transformèrent en halètements, bouche grande ouverte, sous les regards radieux des jeunes messieurs qui se tenaient à l’écart.

Tristan la mâchait, la besognait, la vidait. Et voici à présent qu’il lapait les jus qui s’écoulaient entre ses jambes, pour revenir lécher son clitoris à grands coups de langue, mouillés et lents.

Elle savait qu’elle avait la figure écarlate. Ses tétons étaient comme deux petits noyaux douloureux.

Elle ondulait si violemment que ses fesses se décollèrent du coussin.

Mais c’est avec un gémissement déchirant de déception qu’elle vit la tête de Tristan se relever. On avait donné une secousse à la petite chaîne. Elle sanglota doucement.

Et pourtant ce n’était pas fini ! On le ramenait à côté d’elle, habilement, on le fit se tourner, tête-bêche, puis on lui fit prendre position au-dessus d’elle, sa queue descendit sur les lèvres de la Belle, tandis que sa bouche s’ouvrait toute grande pour venir recouvrir son pubis. Elle leva la tête, lui lécha la queue, tenta de l’enserrer dans l’anneau de ses lèvres, et soudain elle la captura, rehaussa les épaules, la prit plus à fond.

Prise de frénésie, elle la suça jusqu’à la racine, et la douce saveur de miel et de cannelle se mêla au goût chaud et salé des chairs de Tristan. Ses hanches chevauchèrent le coussin, tandis qu’il suçait le petit bouton de son entrejambe. Puis Tristan appliqua sa bouche de façon à recouvrir entièrement les lèvres palpitantes du sexe de la Belle pour laper le miel qui en jaillissait.

Quand elle le sentit, avec une force violente et soudaine, lécher son clitoris et son mont de Vénus, la Belle gémit, cria presque, et elle téta cette queue, la tête s’y balançant, et contracta la bouche à la cadence des spasmes de son entrejambe. Puis, comme l’orgasme, farouche et lumineux, l’inondait, lui arrachant les soupirs les plus profonds, elle sentit son foutre déborder en elle.

Verrouillés l’un à l’autre, ils luttèrent, et tout autour d’eux, sous le dais peuplé de spectateurs, il y eut un long silence. Elle ne voyait rien. Elle ne pensait à rien. Elle sentit Tristan glisser, s’éloigner. Elle entendit à nouveau le grommellement sourd des voix. Elle sut que l’on avait soulevé le coussin et qu’on l’emportait.

Ils descendirent les marches, et tout autour d’elle, dans la chambre des cages, on se mit à jacasser, à voix basse, en proie à l’excitation la plus vive, et les serviteurs angéliques rirent, se parlèrent, chuchotèrent, tout en déposant le coussin sur une table basse.

Puis on aida la Belle à se mettre à genoux, et elle vit Tristan s’agenouiller juste en face d’elle. Il lui enlaça la nuque, on le guida pour qu’il lui enlace la taille et elle sentit ses jambes contre ses jambes, puis sa main presser son visage contre sa poitrine. Elle regardait les anges qui se rapprochaient et vinrent les caresser et les embrasser partout.

Dans la pénombre, la Belle vit les visages doux et sereins des autres Princes et des autres Princesses, qui observaient.

Mais ses charmants ravisseurs avaient décroché les battoirs de bois peints de sa cage et de celle de Tristan. Ils produisirent ces instruments exquis à la lumière, de sorte que la Belle vit l’entrelacs orné de fleurs et de fioritures, et les rubans bleu pâle qui flottaient à l’extrémité du manche.

On amena doucement la tête de la Belle en arrière et on lui plaça le battoir devant le visage, on l’amena à ses lèvres pour qu’elle le baise. Au-dessus d’elle, Tristan fit de même, et lorsqu’on éloigna de lui le battoir, et qu’il baissa les yeux sur elle, ses lèvres avaient ce même demi-sourire.

Il la serra, très fort, et, dès que les premières claques cinglantes s’abattirent, son corps puissant tenta d’amortir ces chocs brefs. La Belle gémissait, se tordait sous les fessées, ainsi que Maîtresse Lockley le lui avait appris. Tout autour d’eux, il n’y eut plus que les rires clairs et impalpables des serviteurs. Tristan baisait les cheveux de la Belle, ses mains lui pétrissaient les chairs, et elle se serrait contre lui, très fort, écrasant ses seins contre son torse, les mains plaquées, ouvertes, dans son dos. Ses fesses gigotaient, la démangeaient, la chauffaient, ses anciennes blessures formant comme de petits nœuds sous le battoir. Tristan fut incapable de rester immobile plus longtemps. Les gémissements de la Belle lui pénétraient le torse, sa queue se dressa entre les jambes de la Belle, et il glissa en elle le gros bout humide de son organe. Les genoux de la Belle quittèrent le coussin. Sa bouche levée trouva la bouche de Tristan. Leurs ravisseurs, jubilant, redoublèrent la force des fessées, et des mains avides, plus fort, plus étroitement, resserrèrent l’étreinte de Tristan et de la Belle.

À suivre.

La Punition
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